Monde multipolaire : Décryptage des enjeux géopolitiques
Monde multipolaire : Décryptage des enjeux géopolitiques

Cet article couvre les catégories suivantes :

Afrique | Amérique | Asie | BRICS | Chine | Économie | Europe | Géopolitique | Multipolarité | Populaire | Russie

Ces dernières années, les tournants géopolitiques majeurs se sont enchaînés et l’ordre mondial a définitivement basculé vers la multipolarité, remettant en question des décennies d’hégémonie américaine.

Cette redistribution du pouvoir entre plusieurs pôles d’influence bouleverse les relations internationales, avec des acteurs comme les BRICS qui défendent une vision alternative à celle de l’Occident.

La Chine et la Russie s’affirment comme des puissances incontournables, tandis que les pays européens cherchent à maintenir une influence en dégringolade dans ce nouvel équilibre géopolitique que ses élites europénnes ne comprennent pas (ou ne veulent pas ou ne peuvent pas comprendre).

J’ai tenu à écrire un article qui reprend les bases pour ceux qui ne saisissent encore pas bien les différentes notions autour de la multipolarité. Nous allons donc voir ensemble comment ce monde multipolaire redessine les rapports de force et transforme fondamentalement notre vision des relations entre pays.

Comprendre le monde multipolaire : définition et caractéristiques

Qu’est-ce que la multipolarité dans les relations internationales ?

Un monde multipolaire désigne un système où plusieurs pôles de puissance exercent une influence significative sur la scène internationale. Cette configuration s’oppose aux modèles unipolaire et bipolaire qui ont marqué l’histoire récente des relations internationales.

La transition vers un monde multipolaire est un phénomène complexe qui a débuté après la chute de l’Union soviétique en 1991, marquant la fin du système bipolaire de la Guerre froide.

La mondialisation économique et l’essor de nouvelles puissances comme la Chine et l’Inde ont considérablement accéléré cette transition vers un monde multipolaire, marquant de plus en plus la fin de la domination occidentale.

Du monde bipolaire au monde multipolaire : une transition historique

La fin de la Guerre froide a fondamentalement transformé l’équilibre mondial. Le système rigide d’alignement sur deux blocs antagonistes a cédé la place à une configuration plus fluide où de multiples centres de pouvoir ont lentement émerger et commencer à exercer leur influence.

CaractéristiqueMonde UnipolaireMonde BipolaireMonde Multipolaire
DéfinitionDomination par une seule super-puissanceÉquilibre entre deux superpuissances opposéesPlusieurs pôles de puissance influents (au minimum 3)
Répartition du pouvoirPouvoir concentré entre les mains d’une seule puissancePouvoir divisé entre deux blocs distinctsPouvoir distribué entre plusieurs puissances
Flexibilité des alliancesOptions d’alignement limitéesAlignement quasi-forcé, sur l’une des deux superpuissancesFlexibilité pour former des alliances variées
StabilitéPlutôt stable mais l’hégémonie d’une seule puissance a fortement tendance a créer un « deux poids, deux mesures » ou à ne laisser aucun échapattoire à ce que la puissance hégémonique attaque les pays plus faibles, sans aucune justice plus haute pour l’arrêterRelativement stable, mais avec des risques de guerre par procuration ou des moments de tensions et une constante crainte d’une escalade (militaire voire nucléaire)Peut paraître comme potentiellement instable en raison de la complexité des interactions mais en réalité, la diversification des puissances instaure une justice équitable et une stabilité profonde et permanente (tant qu’aucune des puissances ne cherche à devenir hégémonique)
Exemple historiquePériode post-Guerre Froide (États-Unis) de 1991 à 2015 environGuerre Froide (États-Unis vs. URSS) de 1945 à 1991Monde actuel (en transition) depuis environ 2015
Légende : Ce tableau compare les caractéristiques des différents ordres mondiaux.

Plusieurs facteurs ont nourri ce basculement vers la multipolarité : la mondialisation des échanges, la révolution des technologies de l’information et les crises économiques successives ont redistribué les cartes du pouvoir mondial, affaiblissant l’hégémonie occidentale au profit de nouvelles puissances.

Caractéristiques et dynamiques d’un ordre mondial multipolaire

L’ordre multipolaire actuel se caractérise par une dispersion du pouvoir entre diverses nations et organisations régionales. Cette configuration engendre des dynamiques complexes où coopération et compétition s’entremêlent constamment dans les rapports entre puissances.

Dans un monde multipolaire, plusieurs caractéristiques sont à prendre en compte pour comprendre son fonctionnement.

  • Équilibre des puissances : La multipolarité implique un équilibre des puissances entre plusieurs pôles influents, empêchant ainsi toute domination unilatérale et favorisant une compétition pour l’influence.
  • Flexibilité des alliances: Les États ont plus de flexibilité pour former des alliances et des partenariats en fonction de leurs intérêts, contrairement aux systèmes bipolaires où les options d’alignement sont plus limitées.
  • Rivalités accrues : La multipolarité peut entraîner des rivalités accrues entre les puissances, chacune cherchant à étendre son influence par divers moyens (économiques, politiques, militaires), ce qui peut engendrer des tensions et des conflits régionaux.
  • Multilatéralisme complexe: La prise de décision est plus dispersée et négociée entre les différents pôles, ce qui rend le multilatéralisme plus complexe mais potentiellement plus juste et équitable.

En conséquence, le monde multipolaire est à la fois une source d’opportunités et de défis pour la stabilité internationale.

La multipolarité génère des tensions entre la recherche d’un nouvel équilibre mondial et les risques d’instabilité accrue.

Les conflits régionaux peuvent s’intensifier lorsque plusieurs puissances soutiennent des camps opposés, comme on l’observe en Ukraine ou au Moyen-Orient.

Les indicateurs de l’émergence d’un monde multipolaire

Plusieurs indicateurs économiques, militaires et diplomatiques confirment cette transition vers un ordre multipolaire.

Le poids croissant des économies émergentes dans le PIB mondial constitue l’un des signes les plus tangibles de cette évolution.

Les transformations au sein des institutions internationales reflètent également cette nouvelle réalité.

Les demandes de réforme du Conseil de sécurité de l’ONU, l’émergence de forums alternatifs comme les BRICS et les initiatives chinoises telles que la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures témoignent d’une volonté de rééquilibrage du pouvoir mondial.

Ces évolutions traduisent la montée en puissance d’acteurs qui contestent l’ordre établi après la Seconde Guerre mondiale et cherchent à obtenir une voix plus importante dans les affaires internationales.

L’économie mondiale se restructure en profondeur

Quand on se penche sur le PIB mondial, on comprend l’ampleur de la restructuration en cours.

Cette restructuration peut encore ne pas être frappant pour l’oeil non averti de monsieur tout le monde, mais elle a bel et bien lieu, et on peut facilement voir les signaux faibles de ce changement majeur quand on connaît les éléments clés à surveiller.

Déjà, le plus simple à voir, est que quand on regarde le Produit Intérieur Brut réparti par blocs, on remarque 3 choses frappantes :

  • Le bloc BRICS+ est devenu le plus gros PIB mondial.
  • L’Union Européenne est complètement larguée.
  • Le reste du monde, les pays qu’on appelle sans cesse « émergents », lorsqu’ils sont combinés, sont équivalents au blocs BRICS+ et ont dépassés les USA.

Mais ça c’est en utilisant le PIB, qui comme je vous l’ai déjà dit, n’est pas l’indicateur le plus réaliste et le plus précis.

Si on veut vraiment comprendre la puissance réelle d’un pays en corrélation avec la réelle valeur de sa monnaie et ce que ce pays peut acheter ou produire avec cette monnaie, de manière concrète, il faut plutôt se fier au PPA (Parité de Pouvoir d’Achat).

Et là, on se rend compte que les pays occidentaux ont des PIB gonflés légérement « artificiellement » du fait qu’ils ont des monnaies fortes.

Mais dans l’industrie et l’économie réelle, ça se restranscrit uniquement dans le fait que tout coûte plus cher dans les pays occidentaux.

Autrement dit, en Occident, pour le même prix (la même masse monétaire) que dans d’autres pays des BRICS, les pays occidentaux peuvent produire moins, car tout coûte plus cher.

Avec le PPA, l’écart se creuse encore plus entre les BRICS, l’UE, les USA et le reste du monde.

Les BRICS+ et le bloc « reste du monde » sont bien plus hauts que les USA et l’UE.

Et quand on prend en compte le fait que les pays de l’UE et les USA stagnent et fond en général à tout casser, du +1% par an, on comprend très vite que comparer aux pays des BRICS+ qui font en moyenne du 3 à 4% de croissance par an, l’écart ne va faire que se creuser de plus en plus rapidement.

Mais le plus frappant, c’est quand on veut être juste un petit peu taquin, et qu’on veut comparer le bloc USA + EU, face au reste du monde, c’est à dire BRICS+ et tous les autres pays du Sud Global ou qui n’appartiennent à aucun bloc, alors là… ça pique.

On se rend compte qu’au final l’Occident n’est plus, mais alors plus du tout l’avenir.

La prosperité et l’avenir économique se trouve désormais en dehors d’Occident et se déplace de plus en plus vers l’Est.

Le dollar n’est plus roi

C’est peut-être le point de rupture le plus fort.

En appliquant des tarifs douaniers généralisés, Trump sape la base même de la domination du dollar. Car si le marché américain devient moins accessible, le dollar devient moins nécessaire.

Le résultat ? Une vague de désengagement.

Les obligations américaines sont délaissées. Les pays du Sud global commencent à commercer en monnaies locales. La dédollarisation devient réalité.

L’Amérique ne peut plus vivre sur la dette éternelle financée par le reste du monde.

BRICS+, Afrique, Eurasie : le monde s’organise autrement

Le timing est parfait. Tandis que les USA se replient, les BRICS s’étendent.

L’Afrique regarde vers Pékin. L’Eurasie s’intègre, de Moscou à Téhéran, via les Nouvelles Routes de la Soie.

Même l’Amérique latine cherche à s’émanciper du FMI et du diktat du dollar.

Le message est clair : le Sud global a tourné la page de l’unipolarité.

BRICS+, Belt & Road, New Development Bank, projets énergétiques en monnaies nationales… Le nouveau monde ne veut plus obéir, il veut coopérer.

Un basculement spirituel, pas seulement économique

Cette rupture n’est pas qu’une question de commerce ou de finance.

Elle est civilisationnelle.

Comme le dit Alexandre Dugin:

Le combat n’est plus gauche contre droite, mais monoculture contre multipolarité.

Le monde ne veut plus du libéralisme évangélique occidental, de la démocratie Coca-Cola ou des ONG « droits-de-l’hommistes » téléguidées par Langley.

Il veut retrouver ses racines : tradition, islam, confucianisme, christianisme orthodoxe, hindouisme et surtout, souveraineté.

Et dans cette quête, l’Amérique est perçue comme un obstacle, pas un modèle.

Émergence et évolution des BRICS comme force géopolitique

L’histoire des BRICS débute en 2001 avec un acronyme inventé par Jim O’Neill, économiste de Goldman Sachs, pour désigner les économies à fort potentiel du Brésil, de la Russie, de l’Inde et de la Chine.

Ce regroupement est passé du concept théorique à une véritable alliance géopolitique contestant l’ordre mondial établi.

Le poids économique des BRICS s’est considérablement renforcé depuis leur première réunion officielle en 2009.

Aujourd’hui, le seul bloc des BRICS+ représente près de 40% de la population mondiale et environ 25% du PIB global, surpassant désormais celui du G7 avec 32,1% contre 29,9% en 2023.

Leur influence s’est concrétisée par la création de la Nouvelle Banque de Développement en 2014 et leur récent élargissement à cinq nouveaux membres (Arabie saoudite, Égypte, Émirats arabes unis, Éthiopie et Iran) en janvier 2024.

Stratégies et objectifs communs des BRICS dans la construction d’un monde multipolaire

Glissant tous vers un monde multipolaire grâce aux BRICS, ces puissances émergentes partagent l’ambition de créer un ordre international plus équilibré où leur voix compte davantage.

Leur objectif central est de réduire la dépendance aux économies occidentales et de promouvoir une reconnaissance de la multipolarité des équilibres économiques et politiques mondiaux.

Les mécanismes de coopération entre les pays des BRICS se sont institutionnalisés à travers des sommets annuels, des groupes de travail spécialisés et des accords multilatéraux.

Le commerce intra-BRICS a atteint environ 15% de leurs échanges commerciaux totaux en 2023, démontrant une intégration économique croissante.

Leur coordination s’étend également au domaine financier avec le mécanisme de coopération des banques centrales facilitant les échanges de devises et renforçant leur position comme alternative aux institutions dominées par l’Occident.

La Chine : moteur de la multipolarité et rivale des États-Unis

La Chine promeut activement un monde multipolaire comme alternative à l’ordre mondial dominé par les États-Unis.

Pékin se positionne comme leader des pays en développement, partageant le même souffle et avenir qu’eux.

Xi Jinping pousse à l’élargissement des BRICS pour créer un nouveau pôle d’influence mondial contrebalançant la puissance américaine.

L’initiative des Nouvelles Routes de la Soie illustre parfaitement la stratégie chinoise de projection d’influence.

Ce projet colossal a généré plus de 1000 milliards d’investissements dans près de 150 pays, connectant la Chine aux marchés européens via l’Asie centrale.

Pékin utilise également son poids économique pour gagner des positions dans les institutions internationales et transforme progressivement sa puissance commerciale en influence géopolitique concrète.

La Russie : restauration d’influence et contestation de l’ordre occidental

La Russie se considère comme un pôle majeur dans le monde multipolaire émergeant. Moscou cherche à restaurer son statut de grande puissance après l’effondrement soviétique et voit dans la multipolarité un moyen de défendre ses intérêts face à l’Occident.

Cette vision constitue un élément central de sa doctrine de politique étrangère.

Le conflit ukrainien a bouleversé les relations entre la Russie et l’Occident, poussant Moscou à renforcer ses alliances avec d’autres puissances, particulièrement la Chine.

Les sanctions occidentales ont accéléré ce rapprochement sino-russe, créant un partenariat stratégique solide.

Malgré son isolement diplomatique partiel du côté occidental, la Russie continue d’exercer son influence partout ailleurs dans le monde, gagnant même du terrain dans les zones traditionnellement « controlés » par l’Occident, comme en Afrique et au Moyen-Orient, contestant l’hégémonie occidentale à travers une diplomatie active dans le Sud global.

L’inde, entre défis, ambitions et réalités complexes

L’Inde est à sa manière le laboratoire du monde multipolaire : diverse, contradictoire, mais incontournable.

Et peut-être est-ce là, justement, sa plus grande force.

J’ai dédié un article à l’Inde, passez y jeter un coup d’oeil si vous voulez mieux comprendre ce pays fascinant.

La compétition technologique et économique comme nouveau front

La rivalité technologique sino-américaine est devenue un aspect central de la compétition pour le leadership mondial.

Cette bataille se joue dans des secteurs stratégiques comme les semi-conducteurs, l’intelligence artificielle, les télécommunications et l’informatique quantique, considérés comme essentiels pour la prééminence géopolitique future.

Washington a mis en place des mesures de découplage économique incluant des restrictions sur les exportations de technologies sensibles vers la Chine et le contrôle des investissements dans les secteurs de pointe.

L’administration américaine encourage activement la relocalisation industrielle pour réduire sa dépendance envers les chaînes d’approvisionnement chinoises.

Cette stratégie vise à préserver l’avantage technologique américain face à l’ambition chinoise de dominer les industries du futur.

La fragmentation technologique qui en résulte redessine profondément l’économie mondiale.

Les États-Unis face à la multipolarité : adaptation ou résistance ?

L’émergence d’un monde multipolaire constitue un défi majeur pour les États-Unis qui perçoivent la montée en puissance de la Chine et d’autres acteurs comme une menace directe à leur hégémonie.

Pour comprendre les réactions américaines face à la multipolarité, il est essentiel d’analyser la doctrine d’hégémonie américaine qui a guidé leur politique étrangère depuis la fin de la Guerre froide.

Après une domination incontestée dans l’après-Guerre froide, Washington a vu son leadership remis en question par l’ascension économique chinoise, la résurgence russe et la contestation portée par le Sud global.

Les attentats du 11 septembre ont marqué un premier tournant dans cette prise de conscience.

Les États-Unis cherchent activement à renforcer leurs alliances traditionnelles, particulièrement avec l’OTAN, pour contenir l’influence croissante de la Chine et de la Russie.

Cette stratégie s’appuie sur une vision « atlantiste » partagée par plusieurs pays européens mais qui montre des signes d’essoufflement.

La politique américaine de « containment » face à la Chine se manifeste par un contrôle accru des investissements dans les secteurs stratégiques comme les semi-conducteurs avancés, l’informatique quantique et l’intelligence artificielle.

Cette approche rappelle les stratégies d’endiguement de la Guerre froide.

Les dilemmes de la superpuissance dans un monde en mutation

Les États-Unis font face à d’importants défis internes qui fragilisent leur position mondiale.

La polarisation politique et la dégradation du modèle démocratique affaiblissent leur soft power et compliquent la formulation d’une politique étrangère cohérente.

Un débat profond divise l’establishment américain entre les partisans d’un engagement mondial actif (en général les démocrates et les néo-conservateurs) et ceux favorisant un repli stratégique (les républicains et le camp de Trump) face aux coûts croissants du leadership international.

Cette tension se reflète dans les oscillations de la politique étrangère entre les différentes administrations, rendant difficile l’élaboration d’une stratégie à long terme pour gérer la multipolarité.

La compétition technologique et économique comme nouveau front

La rivalité technologique sino-américaine est devenue l’épicentre de la compétition pour l’hégémonie mondiale.

Les semi-conducteurs, l’intelligence artificielle et les télécommunications représentent les nouveaux champs de bataille où se joue l’avenir de la puissance.

Washington déploie une stratégie de découplage économique à travers des droits de douane sur les produits chinois, des restrictions sur les investissements et un contrôle renforcé des exportations technologiques.

Ces mesures visent à sécuriser les chaînes d’approvisionnement américaines et à préserver l’avantage compétitif des États-Unis dans les secteurs stratégiques.

L’Union Européenne, la grande perdante du monde multipolaire

La grande perdante du monde multipolaire, sera sans doute l’Union Européenne.

L’autonomie stratégique européenne se définit par la capacité à prendre des décisions indépendamment des pressions extérieures.

Malheureusement, l’Union Européenne, ces 20 dernières années (voire bien plus) n’a fait qu’être une antenne des USA, se structurant quasiment complètement en s’appuyant toujours sur son suzerain américain pour son économie, sa défense, sa politique étrangère et quasiment tout le reste.

En résulte: une UE qui après 30 ans de parrainage américain, a perdu le sens de l’autonomie, n’a aucune réelle ressource sérieuse, aucun réel atout stratégique, aucune avancée dans aucun des secteurs clés, que ce soit l’énergie, l’industrie, la technologie ou autre.

L’Union Européenne n’est devenue qu’une extension de la puissance américaine.

Une vaste zone de consommateurs, et non pas de producteurs, où règne les GAFAM, le mode de vie américain (à peu de choses près) et où toutes les productions américaines (culturelles ou économiques) ne font que se transposer avec 5 à 10 de retard.

Le drame pour l’Union Européenne, c’est que son suzerain, l’Amérique, sur laquelle elle comptait pour quasiment tout, est en train de la quitter pour se concentrer sur ses propres problèmes américains.

Dans un contexte où Washington se détourne progressivement du théâtre européen, l’UE cherche donc maintenant (bien trop tard) à réduire sa dépendance excessive envers les États-Unis tout en défendant ses valeurs et intérêts propres. En tout cas le peu qu’il en reste.

L’Europe affronte aujourd’hui des défis sans précédent depuis 1945.

Les tensions politiques internes couplées à l’émergence de nouvelles puissances, menacent grandement sa cohésion (déjà très artificelle).

Face à ce monde en mutation, l’UE risque l’insignifiance si elle ne parvient pas à s’affirmer comme puissance politique unie, capable de résister aux pressions extérieures et de défendre ses intérêts vitaux.

Le problème, est que l’écrasante majorité des élites européennes, à tous les niveaux, que ce soit régional, national ou au niveau de la commission européenne, sont profondèment incompétentes, larguées et ne comprennent absolument pas l’évolution du monde.

Un continent qui se fait de plus en plus vieux et ringard face à l’Amérique entreprenante, l’Asie jeune et innovante, ou même la Russie, beaucoup plus connectée et devenue un modèle à la pointe dans le secteur bancaire, des infrastructures et des services.

L’Union Européenne donne l’impression qu’elle est toujours gouverner par des gens qui pensent qu’ils peuvent appliquer les mêmes méthodes et la même idéologie que dans les années 60 et 70, et que tout va continuer à rouler et bien se passer, et qu’il suffit de faire semblant de bouger en faisant 3-4 débats par-ci par là, pour faire illusion d’être actif.

Une déconnexion complète du réel, qui montre malheureusement, le décrochage complet d’une zone qui se tiers-mondise à une vitesse effrayante.

Autant de facteurs, qui font que l’Europe ne se relèvera probablement jamais du 21ème siècle.

L’Europe va donc probablement devenir de manière définitive dans le monde multipolaire, un bloc de seconde zone, économiquement et politiquement très moyen voire médiocre, et qui n’a plus auucn réel pouvoir sur la scène internationale.

Enjeux et défis d’un monde multipolaire

Gouvernance mondiale et réforme des institutions internationales

Les institutions internationales créées après 1945 font face à des pressions croissantes pour refléter la nouvelle réalité multipolaire.

Le poids grandissant des puissances émergentes remet en question les structures de gouvernance dominées par l’Occident depuis des décennies.

Cette tension se manifeste particulièrement au sein de l’ONU, où la composition du Conseil de sécurité ne reflète plus les rapports de force actuels.

Le Sud global revendique une plus grande influence dans la prise de décision mondiale. et martèle que la stabilité du monde ne doit pas dépendre d’une seule puissance.

Des réformes substantielles semblent nécessaires pour préserver la légitimité du système multilatéral dans ce contexte de redistribution du pouvoir entre plusieurs pôles d’influence.

Stabilité et sécurité dans un monde fragmenté

Cette phase de transition vers la multipolarité engendre des risques d’instabilité accrus dans un monde où les sphères d’influence se chevauchent et ne sont pas encore complètement ancrées.

La guerre en Ukraine illustre comment les conflits peuvent s’intensifier rapidement lorsque les mécanismes de régulation internationale s’affaiblissent et ne sont pas encore adaptés au monde multipolaire.

La compétition entre grandes puissances prend désormais des formes nouvelles et hybrides.

Des cyberattaques aux guerres de l’information, en passant par les conflits économiques, le champ de bataille s’est considérablement élargi.

Ces affrontements indirects compliquent l’établissement de normes communes dans un environnement international marqué par la méfiance.

La multiplication des acteurs capables de projeter leur puissance crée un système international plus complexe, où les alliances sont plus fluides et les équilibres plus précaires.

Défis économiques et commerciaux de la multipolarité

L’économie mondiale subit une transformation structurelle majeure avec la fragmentation des chaînes de valeur. Cette évolution s’explique par les tensions géopolitiques croissantes et la recherche d’autonomie stratégique par les principales puissances.

Le système commercial international, fondé sur l’ouverture et la libéralisation, fait face à des pressions protectionnistes grandissantes.

La rivalité sino-américaine déclenche une reconfiguration des flux commerciaux mondiaux, divisant potentiellement le monde en blocs économiques distincts.

Les considérations de sécurité nationale prennent le pas sur l’efficience économique, notamment dans les secteurs technologiques et stratégiques.

Cette tendance pourrait compromettre les gains de la mondialisation et affecter négativement la croissance économique mondiale.

Perspectives d’évolution de la multipolarité mondiale

Scénarios pour l’ordre mondial de demain

L’avenir de la multipolarité mondiale offre diverses trajectoires, allant d’un équilibre coopératif entre puissances à des confrontations plus marquées.

Les BRICS joueront un rôle déterminant dans cette reconfiguration, tandis que la position des États-Unis et l’émergence de la Chine façonnent déjà les contours de cet ordre international en mutation.

Plusieurs variables détermineront l’évolution du monde multipolaire :

  • les dynamiques économiques, avec notamment l’essor continu des marchés émergents
  • la montée des nationalismes qui encourage une diplomatie plus complexe
  • les capacités militaires et nucléaires comme outils d’influence
  • la solidité des alliances stratégiques, particulièrement face aux tensions croissantes entre l’Occident et le bloc Sino-Russe.

L’ordre mondial multipolaire s’impose désormais comme une réalité incontournable, où les BRICS s’affirment face à l’hégémonie occidentale traditionnelle.

Cette redistribution du pouvoir entre plusieurs pôles d’influence transforme radicalement les relations internationales, obligeant chaque nation à repenser sa stratégie géopolitique.

Entre coopération nécessaire et compétition inévitable, l’avenir de notre monde multipolaire dépendra de notre capacité collective à bâtir des mécanismes de régulation adaptés à cette nouvelle donne, où l’équilibre des puissances remplace progressivement la domination d’un seul bloc.

Alexis LSK est un entrepreneur et analyste géopolitique spécialisé dans l’Eurasie. Il est connu pour ses analyses mêlant à la fois méthodes OSINT, connaissances de terrain (expatrié depuis plus d’une décennie) et un vaste réseau de contacts. Il décrypte pour le grand public avec une pédagogie limpide, les grandes dynamiques du monde multipolaire.

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